Une bataille… de polochons ?

Chronique d’enfance. Bataille de polochons.

Au lendemain du 1er avril et ses poissons en tous genres, que diriez-vous d’une Journée des batailles d’oreiller ? Oui… J’ai eu, moi aussi, cette moue dubitative, accompagnée d’un « n’importe quoi ! »

Puis un sourire s’est dessiné sur mes lèvres, au souvenir de celles partagées durant mon enfance.

Cette guerre-là, fratricide ou amicide – je sais, ça n’existe pas « amicide », on ne tue pas ses amis, alors que sa famille, oui – était totale, sans concession, sans pitié. Ni pour les belligérants, ni pour les armes. Les plumes volaient, les cris et les rires retentissaient. Les embuscades étaient à chaque porte, derrière chaque mur, tapies dans le moindre recoin. Les renversements d’alliances faisaient rage. Les cavalcades étaient la seule défense : battre en retraite, contre-attaquer, se cacher, se tenir prêt ou disparaître. Le rire à venir se pelotonnait au creux de notre estomac, se nourrissait de l’attente et de l’anticipation. Il trépignait à l’intérieur de nous, impatient de surgir, de s’envoler, de contaminer les autres protagonistes.

Le pire qui pouvait arriver était un coin d’oreiller dans l’œil. Il signait la fin immédiate des combats, un armistice fugace dont on savait qu’il ne résisterait pas au-delà du prochain mercredi. Les plus avertis portaient des lunettes de soleil. L’inconvénient était qu’ils ne voyaient plus grand chose à l’intérieur. Des choix étaient à faire, évidemment.

Le pire n’advenait pas à chaque bataille. Nous finissions plus généralement, harassés et hilares, assis ou à genoux, chacun serrant son oreiller contre lui, contemplant le désastre qui manquait rarement de survenir dans les pièces où notre guerre nous avait entraînés. Nous entreprenions alors de ranger et d’aspirer les traces de nos combats. Il ne restait qu’à redresser ce qui était tombé.

Nous avions la sagesse d’épargner les zones où nous aurions détruit des choses fragiles. Aujourd’hui, je songe à ces dirigeants qui font des concours de gros bras, à ces photos d’enfants sur un vélo coloré ou tenant des rollers roses à la main devant des gravats, et je me demande si les premiers n’auraient pas quelque chose à apprendre des seconds.

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